Inquiets pour les ours polaires menacés, entre autres, par le réchauffement de la planète, le gouvernement américain a proposé mercredi de placer les ours polaires sous la protection de la loi sur les espèces menacées.
La pollution et la chasse constituent également un danger pour l'espèce. Le Groenland et la Norvège abritent le plus grand nombre d'ours polaires, mais près de 5.000 vivent en Alaska.
Le ministre de l'Intérieur devait annoncer mercredi soir que les ours polaires doivent être classés parmi les espèces menacés, a confirmé un responsable du Département. Cette catégorie est réservée aux espèces qui ont de grands risques de disparaître.
Une telle décision empêcherait le gouvernement américain d'autoriser toute activité pouvant mettre en danger les ours ou la banquise sur laquelle ils vivent. Une banquise moins importante réduit la quantité de nourriture dont dépend l'animal.
Les écologistes espèrent que les protections de l'Endangered Species Act pourront à terme donner une impulsion au gouvernement pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre, responsables du réchauffement climatique. Le refus du président américain George W. Bush de ratifier le protocole de Kyoto sur le réchauffement a entraîné de vives tensions entre les États-Unis et d'autres pays.
Or, le nombre d'ours polaires diminue dans l'Arctique, où leur population est passée de 25.000 à 20.000, selon l'Union mondiale de la conservation de la nature. L'organisation classe l'espèce parmi les 16.000 qui sont menacées dans le monde et estime que leur nombre reculera de 30% d'ici les 45 prochaines années. Quant à la banquise, elle diminuera de 50 à 100% d'ici 50 à 100 ans, selon elle.
Réactions
"C'est une victoire pour l'ours polaire, et toute la faune menacée par le réchauffement climatique", a réagi mercredi Kassie Siegel, avocate du Centre pour la diversité biologique. "Il est encore temps de sauver les ours polaires, mais nous devons immédiatement réduire les émissions de gaze à effet de serre".
«Toute administration américaine a sa limite. Richard Nixon l'avait atteinte au Cambodge et John F. Kennedy dans la baie des Cochons. Jusqu'à présent, le président George W. Bush n'avait jamais trouvé d'adversaire à sa mesure. Mais, même pour lui, l'ours polaire s'avère finalement le combat de trop», s'amuse Time, le grand hebdomadaire américain.
Pour l'écrasante majorité des scientifiques, la fonte des glaces est liée au réchauffement global de la planète, causé par les activités humaines et particulièrement sensible en Arctique. «Mais, lors d'une conférence de presse, le secrétaire à l'Intérieur Dirk Kempthorne a déclaré que, bien que sa décision de protéger les ours polaires reconnaisse le phénomène de la fonte des glaces en Arctique, son ministère ne prend pas position sur ses causes et sur ce qu'il faut faire face à cela», précise le New York Times.
En d'autres termes, l'administration américaine n'est pas prête à reconnaître officiellement les responsabilités humaines dans ces changements climatiques. Sur ce sujet, le président Bush a toujours adopté une position de défiance face à la communauté internationale, notamment en refusant de faire ratifier le protocole de Kyoto par le Congrès américain.
«Pourquoi, deux ans avant de quitter la Maison-Blanche, l'administration Bush a-t-elle décidé soudainement de se rallier à la cause de l'ours polaire ?» se demande, dubitatif, The Independent dans un éditorial. La raison est simple : le ministère de l'Intérieur a annoncé cette décision, prise au bout de deux années de réflexion, en réponse à l'action en justice lancée par trois organisations de défense de l'environnement, le Centre pour la diversité biologique, le Conseil de défense des ressources naturelles et Greenpeace. Ces organisations reprochaient au gouvernement américain de tarder à reconnaître la condition déplorable de l'ours polaire. Du coup, le journal britannique, très alerte face aux problèmes écologiques, ne cache pas son scepticisme. «En fait, cette annonce n'inscrit pas l'ours polaire sur la liste des espèces menacées, elle ouvre plutôt une période de trois mois de débat public. Quand ce délai sera écoulé, si les militants ne maintiennent pas leur pression, l'administration pourrait simplement laisser tout tomber.»
Reste que, selon le Washington Post, «considérer les ours polaires comme une espèce menacée d'extinction pourrait avoir un impact pratique et politique énorme. En tant qu'ours le plus grand au monde et objet d'affection des enfants tout autant que des publicités commerciales de Coca-Cola pendant la période de Noël, l'ours polaire occupe une place importante dans la psychologie américaine. »
C'est pourquoi l'intransigeant Independent savoure quand même cette «grande avancée». Et espère que, «avec une opinion publique plus vigilante et un Congrès contrôlé par les démocrates, l'administration Bush pourrait se voir forcée d'imposer des limites aux émissions industrielles de CO2 aux Etats-Unis».
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